Des siècles de guerres, le terrible génocide (1918-1919) qui a réduit sa population de près d’un million d’individus, un violent tremblement de terre en 1988 qui dévasta le nord du pays, aujourd’hui encore, le pays est soumis à une situation économique difficile comme en témoigne la fermeture en mars dernier de l’usine de traitement du cuivre dans la ville d’Alaverdi au nord-est du pays. Aucun plan social n’est prévu, et 70% des femmes qui y travaillaient ont contracté le cancer du sein.
Cependant, contre toute cette infortune, les Arméniens assument. Ils sont sereins face à cette adversité sur laquelle ils n’ont aucun pouvoir. Certes chaque 24 avril, une commémoration du génocide se tient au monument Tsitsernakaberd à Erevan et tout au long de l’année des gens viennent s’y recueillir, mais, comme nous l’a dit notre guide, les gens se souviennent, mais ont envie de vivre au présent. Et ils prennent leur temps dans la capitale Erevan qui comptabilise un peu plus d’un million d’habitants, au milieu de bâtiments austères datant de l’époque russe, de flâner dans ses parcs qui offrent une totale sérénité.
En apparence, il serait possible de voir l’Arménie comme un pays peu développé culturellement. Il n’en est rien. Erevan se veut moderne et peut se targuer d’avoir de très intéressantes collections d’art à l’intérieur et aux alentours de la spectaculaire Cascade, œuvre où se mélangent la pierre, l’eau et les végétaux. Dans cet écrin se situe le Centre Cafesjian pour les Arts, plus simplement nommé CCA créé par son fondateur, l’homme d’affaire Gérard L. Cafesjian, Arménien ayant vécu aux USA.
Situé au centre de la ville, ouvert en 2009, le CCA a déjà attiré près d’un million de visiteurs. Cette fréquentation montre combien le Centre recèle des merveilles. Que l’on gravisse ses escaliers extérieurs ou que l’on emprunte les multiples escaliers roulants intérieurs, l’art est omniprésent.
Il enveloppe, surprend, fascine et laisse le visiteur bouche bée devant tant de diversité et de créativité. Voir le Palace de Crystal de Swarovski, le plafond en verre soufflé composé de 252 pièces par l’américain Dale Chihuly.
Dans une autre salle, d’un auteur anonyme, des éléments de l’exposition universelle de Paris en 1900 en bois recouvert d’or et encore l’immense fresque taillée dans le tuf par l’artiste arménien Artashes Hovsopyan.
Une exposition d’affiches des précédentes expositions et un remarquable triptyque de 5,80 mètres de hauteur et 16 m. en longueur représentant les temps forts du pays : la présentation de l’alphabet arménien, Vardanank en référence à une bataille pour la libération religieuse et la résurrection de l’Arménie. Des personnages publics connus sont intégrés Sur chacun de ces volets.
La fascination est au rendez-vous. Le hall central est ouvert toute la semaine, tandis que les salles latérales ne le sont que le weekend.
L’Art intra et extra muros
L’Art n’est pas seulement enfermé dans les murs. En sortant du CCA, encore envoûté par l’émanation de la puissance créatrice, les découvertes se poursuivent sur la promenade devant de la Cascade : « Mujer Fumando » du chilien Fernando Botero, le « Kiwi » en aluminium de Peter Woytuk ou encore « Lion 2 » du sud-coréen Ji Yong-Ho composé d’acier inoxydable et de pneus usés et encore bien d’autres. La zone piétonne invite à la relaxation. Les bancs y sont nombreux et l’espace suffisant pour s’approprier, ne serait-ce qu’un instant, l’aura des œuvres présentées.
L’Art ne se cantonne pas seulement à des endroits spécifiques. Il fait partie intégrante de la vie de cette capitale en pleine phase de modernisation. De jour comme de nuit, il fait bon y flâner en toute sécurité. Un pays, une ville qui méritent que l’on s’y intéresse ainsi que tant d’autres endroits à découvrir.
Texte et photos Marguerite Martinoli / Juillet 2019