Le camping doit se réinventer en Suisse

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Le cœur de cible du TCS pour ses campings est les retraités et les familles suisses, outre les étrangers.

Poser sa caravane chaque année au même endroit plusieurs semaines, c’est terminé. Le camping d’aujourd’hui est itinérant. Et les zones dévolues à cette activité n’ont d’autre choix que de (re)gagner en attractivité. Le point.

Depuis 6-7 ans, le profil des campeurs a changé. Ils sont devenus très mobiles. La preuve avec les ventes de camping-cars, qui ont doublé ces cinq dernières années en Suisse. «Cette tendance se remarque également dans les campings TCS (27 au total), où les saisonniers fixes sont en diminution, indique Oliver Grützner, responsable tourisme & loisirs auprès du Touring Club Suisse, à Schönbühl (BE). Cela s’explique parce que les aficionados prennent de l’âge et les touristes d’aujourd’hui – jeunes essentiellement – ne sont pas férus de vacances à un seul endroit.»

Désormais, les campings où les passionnés se retrouvaient de génération en génération pour une ou plusieurs semaines, comme celui de Salavaux (VD, photo), par exemple, ne peuvent plus uniquement compter sur cette clientèle «statique».

La «bougeotte» actuelle est alimentée par le prix des camping-cars, meilleur marché que par le passé, à plus forte raison s’ils sont achetés à l’étranger (sic). Pour l’anecdote, il n’est pas rare que certains retraités optent parfois pour un mobil-home à la place d’un appartement!

Ajoutons que le franc fort incite les «campeurs nomades» à voyager davantage en zone euro.

Baisse notable des nuitées dans les campings

Pour ces raisons et depuis 2009, les nuitées dans les 400 campings helvétiques couverts par les statistiques ont diminué de 30%, même si elles sont encore au nombre de 2,8 millions par an, surtout grâce aux Suisses. Le TCS en réalise un demi-million dans ses 27 campings et ils comptent pour 17% environ du marché national des touristes mobiles.

«L’idée du camping n’est certes pas morte, mais les vacanciers cherchent dorénavant de l’hôtellerie en plein air, le glamping, un néologisme qui signifie dormir sous tente en pleine nature avec le confort d’une chambre d’hôtel», précise Oliver Grützner.

A noter que la France est le pays européen le plus mature à ce niveau, qui propose de véritables complexes où se retrouvent les mobilhomes, dont les occupants peuvent profiter de piscines, saunas, places de jeux, voire de la plage.

Les campeurs étrangers, eux, évitent la Suisse pour une question de coûts. «Il est cependant difficile de les baisser dans la mesure où nos charges sont élevées», argumente le responsable tourisme & loisirs du TCS.

Réinventer les séjours au camping

Reste la solution de l’attractivité avec des emplacements idylliques, que l’on peut facilement atteindre par la route, proposant un accès direct au lac ou au fleuve selon les régions, des sanitaires de qualité, le wifi…

«Pour faire simple, une offre en rapport avec le prix demandé pour attirer les étrangers et, en Suisse, les retraités et les familles, notre cœur de cible. Mais ce n’est pas tout: pour gagner de nouveaux clients, il convient, parallèlement, d’offrir un produit lifestyle, changer l’image un peu «beauf», qui colle encore quelquefois au camping. De nos jours, s’il pleut, on est bien protégés et les chaises en plastique n’existent plus!, sourit notre interlocuteur. S’agissant des activités, l’air du temps est au stand-up paddle, à une restauration axée sur les produits du terroir, aux événements tels des concerts, etc.»

Didier Walzer


Les campings suisses, bientôt des complexes de vacances?

Les 27 campings du TCS – non subventionnés par le siège – affichent 30 ans d’âge. «Il convient de les moderniser, les repositionner et cela passe par la différenciation, l’innovation architecturale, l’émotion. Telle une PME, ils ont tout à gagner à s’engager et investir dans cette voie», préconise Oliver Grützner, responsable tourisme & loisirs au TCS.

Le grand club helvétique de la mobilité a commencé de mettre en place une nouvelle stratégie consistant à rénover ses campings, élargir les parcelles et installer le wifi partout.

Pour Oliver Grützner, leur potentiel est indéniable pour autant que l’on dépasse le seul cercle des membres TCS. «La clientèle internationale est clairement visée – d’autant que les Asiatiques se mettent au camping – et nous disposons des instruments marketing pour valoriser le camping du XXIe siècle. L’un des arguments est qu’il est plutôt bon marché comparativement à un séjour en été sur la Côte d’Azur. Casser cette image de cherté est impératif.»

Par ailleurs, le responsable tourisme & loisirs du TCS appelle un nouveau type de saisonniers de ses vœux. Des vacanciers qui arriveraient avec leur propre camping-car, se verraient proposer de louer un petit jardin, une maisonnette, pour plusieurs mois. En filigrane, l’objectif de faire des campings d’aujourd’hui de véritables centres de vacances, loin des «communautés de campeurs» d’autrefois.

«Les séjours au camping sont individuels, riches et variés, en pleine nature, souvent au bord d’un lac. De surcroît, ils offrent une grande sécurité», conclut Oliver Grützner.

Une nouvelle offre appelée à créer une nouvelle demande, en somme.


Camping de Delémont: le restaurant pour compenser la chute des saisonniers

Les campings-clubs TCS, dont celui de la Section jurassienne, éprouvent des difficultés à recruter de nouveaux membres, mais leur effectif reste toutefois stable, car le Touring-Club Suisse a une grande tradition en la matière. Juridiquement indépendants, ils peuvent toutefois bénéficier de conseils de la part des sections qui les chapeautent, via Oliver Grützner.

Sur le terrain, au camping de La Grande Ecluse, à Delémont (qui appartient à la Section jurassienne du TCS), tenu par le couple Marcelle et Jean-René Hostettmann depuis 7 ans, on déplore également une diminution des saisonniers: «C’est vite vu, déclare ce dernier, lorsque nous sommes arrivés, il y en avait 27 et ils sont tombés à 20 en 2016. Nous en avons donc perdu un par année.» Il constate également que les caravanes ont de moins en moins la cote comparativement aux mobilhomes. «Mais, depuis l’ouverture de la Transjurane, les campeurs itinérants ne sillonnent plus les petites routes et passent donc à côté de nos infrastructures, analyse Jean-René Hostettmann. Pour ne rien arranger à nos affaires, ces véhicules sont désormais autonomes, équipés de panneaux solaires. Ils n’ont donc plus besoin de s’arrêter dans un camping pour se recharger en électricité. Si on ajoute à ces phénomènes un autre, naturel, la météo, pas toujours au beau fixe…». Heureusement pour les tenanciers, le restaurant de La Grande Ecluse affiche complet dès que le soleil est au rendez-vous!