Attachante Géorgie

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Prose architecturale… Vieille ville de Tbilissi.

De Tbilissi à Koutaïssi, en s’aventurant sur les chemins de traverse, la Géorgie recèle nombre de trésors. Entre ses anciens monastères, châteaux forts et habitations troglodytes, au cœur de paysages de caractère dessinés par la majestueuse chaîne caucasienne, ce petit pays de moins de 4 millions d’habitants, aux influences occidentales et orientales, invite à la découverte. Version ville ou campagne, balade sous le charme d’une terre authentique et méconnue.

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Au gré de la balade.

 Tbilissi. Une ville au nom aussi imprononçable qu’intrigant. La capitale d’un pays méconnu, flirtant, à l’ouest, avec la mer Noire, commerçant, au sud avec ses meilleurs voisins, la Turquie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan, entretenant au nord, avec la Fédération de Russie, des relations empruntes de défiance. Héritage d’un passé communiste différemment apprécié – la Géorgie, patrie de Staline, est sortie du giron de l’ex-Union soviétique en 1991 – et de deux épines dans le flanc de cet Etat désavoué par l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud. Des républiques séparatistes autonomes au statut controversé, soutenues par Moscou et théâtre de conflits armés, qui générèrent le déplacement de centaines de milliers de personnes… Mais revenons au pays de la Toison d’or et à Tbilissi qui signifie, en géorgien, «chaud». Cette appellation aurait été donnée en 452 par le roi Vakhtang Gorgassali. La légende raconte que ce dernier chassait le faisan avec son faucon lorsqu’il aurait retrouvé sa proie… cuite, tombée sous ses flèches dans une source d’eau chaude. Fasciné, le monarque aurait alors décidé de construire une ville à cet endroit. Quoi qu’il en soit, la capitale reste associée à ses bains thermaux érigés au 18e siècle à Abanatoubani, l’ancien quartier musulman. Sous ses bulbes orientaux, leur eau sulfureuse attire toujours habitants et visiteurs dont jadis deux Alexandre célèbres, Dumas et Pouchkine.

Prose architecturale

Diversion poétique aussi en s’aventurant dans la vieille ville, au pied de la forteresse Narikala, le regard happé par une joyeuse prose architecturale quand bien même le temps en a esquinté quelques strophes. Flânerie au milieu de jolies maisons de pierre et de bois aux balcons dentelés, souvent flanquées d’escaliers extérieurs de fer aux montées alambiquées, de cours barrées de lessives colorées séchant au vent. A la découverte de ruelles pleines de cachet, balisées d’anciennes églises, dont celle émouvante d’Antchiskhati – la plus vieille de la cité datant du 6e siècle –, de synagogues ou encore d’une mosquée que se partagent chiites et sunnites! Une pluralité religieuse et culturelle aux racines profondes… «Au 11e siècle, le roi David IV annonça que tous les étrangers étaient bienvenus sur cette terre, chaque famille devant toutefois mettre un de ses membres à disposition de l’armée… La tradition d’hospitalité a perduré. Le pays accueille des Juifs, des Arméniens, des Grecs, des Allemands, des Russes, des Kurdes…» affirme Anna Uturgauri, guide. Un des symboles de Tbilissi illustre cet esprit: la statue Kartlis Deda (mère de la Géorgie). Haute de 58 mètres, cette géante en aluminium, érigée en 1958, domine la ville de sa colline hérissée des vestiges des fortifications. Elle tient dans une de ses mains une coupe de vin, en signe d’hospitalité, et dans l’autre une épée… pour qui viendrait en ennemi et alors que la cité fut envahie par les Perses, les Arabes ou encore les Turcs et souvent détruite. Un monument plus emblématique que beau qui offre une vue panoramique sur la capitale et des bâtiments audacieux. A l’image du magnifique pont piéton de la Paix (2010) enjambant le fleuve Koura. «Vague» lumineuse d’acier et de verre, reliant élégamment le vieux Tbilissi à la ville moderne.

Ferveur rassembleuse

Impossible d’évoquer la capitale sans encore mentionner ses rues marchandes, dont ses «Champs-Elysées, incarnés par l’avenue Roustavéli du nom du poète du 13e, son opéra de style mauresque, son téléphérique… mais aussi la grisaille d’anciennes barres d’immeubles soviétiques piqués d’antennes paraboliques. Impossible de faire l’impasse sur sa cathédrale de la Sainte-Trinité, frôlant le ciel du haut de ses 92 mètres et son campanile voisin, comme dans la plupart des églises géorgiennes. Flambant neuf, ce monument en dit long sur le poids de l’Eglise orthodoxe dans la société géorgienne – l’une des premières à s’être convertie au christianisme au 4e siècle propagé par sainte Nino. Une ferveur qui, après le divorce avec l’ex-URSS, et alors que le pays, confronté à une brève et violente guerre civile affrontait une grave crise économique, s’est encore raffermie. «Au lendemain de l’indépendance et du chaos politique qui a suivi, la religion a joué un rôle rassembleur, figurant parmi les symboles de la renaissance de la Géorgie», explique Anna Uturgauri. Et de préciser qu’à cette époque, quelque 1,5 million de personnes – essentiellement des hommes – ont émigré. Départs non sans incidence sur la démographie… «Pour encourager les naissances, le patriarche très respecté Ilia II a alors promis qu’il baptiserait personnellement tous les troisièmes nés dans les familles. Des milliers d’enfants depuis ont vu le jour.»

Outre l’intérêt que présente la capitale, d’autres villes méritent le détour à l’image de la dynamique Koutaïssi, seconde cité du pays, ou de l’historique Gori, où naquit Staline. Un musée datant de 1957 réunit nombre de cadeaux offerts au dictateur et retrace en photos son parcours, sans évoquer sa responsabilité dans l’assassinat et la déportation de millions de personnes. Et alors que des débats se tiennent pour savoir si le lieu doit être maintenu en l’état ou transformé en espace critique. La réalité sera toutefois abordée sans fard par le guide présentant aussi, à côté de l’édifice, la maison natale du petit père des peuples, et son wagon de train blindé… autrefois propriété du tsar.

Des trésors en cascade

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Le monastère médiéval de Ghélati, non loin de Koutaïssi, à l’ouest du pays. Il a été fondé en 1106 par le roi David IV qui y est enterré sous le seuil d’une de ses anciennes entrées. Le monarque souhaitait ainsi que son nom disparaisse sous les pas des fidèles, s’estimant un homme comme les autres.

Attachante et authentique, la Géorgie séduit aussi largement par une nature préservée et par son superbe parc national de Borjomi recelant ours, lynx, cerfs… Le long des contreforts du Caucase, les paysages se déclinent en forêts verdoyantes, canyons spectaculaires, grottes, collines, steppes ou encore vignobles – le pays compte plus de 500 cépages et des crus réputés. De Tbilissi à Koutaïssi, en s’aventurant sur les chemins de traverse, se déroulent des chapelets de monastères, de châteaux forts juchés sur des nids d’aigle, d’extraordinaires sites troglodytes, dont celui, vertigineux, de Vardzia, à un jet de pierre de la Turquie. Une place forte établie au 12e siècle du temps de l’illustre reine Tamara, s’échelonnant sur 13 étages et truffée de 600 pièces et galeries creusées dans l’impressionnante paroi… Autant de vestiges d’un passé aux nombreuses strates encore visibles.

Site troglodyte de Vardzia, à un jet de pierre de la frontière turque.

Site troglodyte de Vardzia, à un jet de pierre de la frontière turque.

Le voyage charme également dans une version plus ordinaire, ponctuée d’images de troupeaux de moutons et de leurs bergers, de vaches indisciplinées déambulant sur les routes, d’inquiétants ponts suspendus, de vieilles Lada rafistolées – voiture emblématique de l’ex-Union soviétique… Sans oublier l’attrait de petites localités à l’image de la romantique Sighnaghi qui a subi une cure de jouvence et draine dans sa Maison du mariage nombre de couples. Un rien kitch mais propre à séduire une société toujours très attachée à cette tradition…

Un pays viticole. Il compte plus de 500 cépages et des crus réputés.

Un pays viticole. Il compte plus de 500 cépages et des crus réputés.

Textes et photos Sonya Mermoud

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 Le monastère d’Alaverdi, dans la région de Kakhétie.

Le monastère d’Alaverdi, dans la région de Kakhétie.

Vol quotidien Genève-Tbilissi ou Koutaïssi avec Ukraine International Airlines via Kiev.

Au marché de Koutaïssi.

Au marché de Koutaïssi.

Informations supplémentaires: www.georgia.travel, www.gnta.ge