L’espoir retrouvé de l’Arménie

Le monastère de Tatev. Pour s’y rendre, il faut emprunter un téléphérique, installé par une entreprise suisse  / Photo Comité national du Tourisme arménien.

Un pays qui accroche le coeur des visiteurs.

Par Romaine Jean

Irene Chaboyan est guide touristique et parle un français d’Académie, appris à l’université d’Erevan, au temps où son pays était encore une république soviétique. Elle est aussi diplômée de Sciences Po Paris et de l’Institut d’études européennes de Genève. Irène Chaboyan est à l’image de son pays: totalement étonnante! Les Européens sont de plus en plus nombreux à être attirés par cette petite république du Caucase, qui accroche le cœur des visiteurs. Le secteur du tourisme est en pleine expansion, une augmentation à deux chiffles l’an dernier, à la faveur d’une situation politique qui redonne espoir au pays.

Tradition et culte du futur

L’Arménie est un pays de montagnes, de volcans, d’églises, de vignes, d’abricots et de grenades. Un mélange de tradition millénaire et de projets futuristes. Dans la capitale Erevan, le centre « Tumo », financé par la diaspora arménienne, forme près de 10.000 jeunes adolescents à la robotique ou à la programmation informatique. Et se visite. Non loin de là, au centre-ville, la statue de Mesrop Machtots rappelle que c’est au cinquième siècle déjà que fut inventé l’alphabet arménien.

Des trésors de manuscrits, livres anciens, russes, grecs, latins, manuels d’arithmétique peuvent s’admirer au musée du Matenadaran. Visiter l’Arménie c’est se faire surprendre en permanence.

La capitale Erevan concentre le tiers des habitants du pays et est devenue une métropole moderne.

Aujourd’hui, Erevan est une métropole moderne, d’un million deux cent mille habitants et son centre claque d’enseignes de luxe, de restaurants, bars, petites échoppes, marchands de rue. Mais les premières traces de la capitale remontent au huitième siècle av. J C.

Avant Rome! Les terrasses des cafés grouillent d’une jeunesse qui veut croire que l’espoir est désormais permis pour ce pays qui a vécu tant de tragédies. La révolution de velours, menée l’an dernier, n’a-t-elle pas balayé des années de corruption, sans aucune effusion de sang?

Une nation chrétienne

Le monastère de Khor Virap, avec le mythique mont Ararat, qui culmine à 5153 m.

En quittant la capitale, pour emprunter la route de l’opulente plainede l’Ararat, où poussent en abondance légumes, abricots et grenades, c’est le monastère de Khor Virap qui surgit au détour d’une colline.

C’est là que Saint Grégoire l’Illuminateur fut emprisonné, avant de faire de l’Arménie la première nation chrétienne au monde. Tout rappelle les liens sacrés de ce pays avec son Dieu. Les fidèles fréquentent quotidiennement les innombrables églises illuminées de bougies et les prières aident sans doute à surmonter les défis que doivent encore affronter les villages de province. La Genèse raconte que c’est sur la montagne mythique du mont Ararat que l’arche de Noé échoua après le déluge. Au sud du pays, le monastère de Tatev se visite en empruntant le plus long téléphérique du monde, construit par une entreprise suisse, dans un décor époustouflant. Au 10e siècle, on y surveillait l’arrivée des envahisseurs arabes.

Un foisonnement artistique

L’Arménie couvrait autrefois un empire allant de la mer Caspienne à l’Egypte. Il reste aujourd’hui un pays montagneux, grand comme laBelgique, qui a surmonté toutes les tragédies, par un foisonnement artistique unique. A Gyumri ou ailleurs, les restaurants résonnent des concerts de duduk, le hautbois au son si nostalgique et profond. Erevan possède des dizaines de galeries d’art, des maisons musées de poètes ou d’artistes, que l’on peut visiter comme celle du peintre Matriros Sarian_ Et la capitale emménage, pour dans deux ans, un centre totalement futuriste, à la mémoire du plus célèbre des Arméniens, Charles Aznavour.

La vigne

L’Arménie est un pays qui a le goût des bons vins. Photo Sonya Mermoud.

L’Arménie vit une véritable renaissance de ses vins, dont certains se vendent aujourd’hui à plus de 200 francs la bouteille, dans les palaces de Moscou. Vahe Keushguerian, un Arménien de la diaspora, retourné il y a 10 ans sur la terre de ses ancêtres, n’y est pas étranger. Il est né à Beyrouth, a vécu près de Florence et dans les Pouilles, pour assouvir sa passion pour la viticulture. Aujourd’hui, il est, avec ses enfants qui ont étudié dans les meilleures écoles, l’un des principaux producteurs du pays et a créé une filière de formation des métiers du vin. L’Arménie a de tout temps été une nation viticole. Dans la région d’Areni, où le négociant suisse Jakob Schuler possède un vaste domaine, des archéologues ont découvert un vase, avec des pépins de raisins, vieux de 6.000 ans ! On peut visiter ces cavernes, composées de trois chambres, qui nous mettent face à notre Histoire et nous rendent philosophes ! C’est aujourd’hui une culture de la qualité et de la diversité qui s’est installée en Arménie et des caves ont été ouvertes de partout, parfois somptueuses, souvent conseillées par des techniciens de l’institut allemand de Geisenheim. Depuis trois ans, chaque début mai, Erevan organise « les journées des vins », un festival qui présente plus de 200 sortes de vins et des spécialités culinaires, attirant 10.000 touristes et professionnels des 5 continents. L’Arménie a le goût des bons vins et de la bonne cuisine. Le nouveau premier ministre, Nikol Pachinyan, qui a mené la révolution pacifique l’an dernier et porte l’espoir du pays, était présent au festival, qui est devenu, dit-il, « une carte de visite de l’Arménie ».

QUELQUES CHIFFRES

Superficie: 29 800 km2

Habitants: 3 millions à l’intérieur, 7 millions dans la diaspora

Frontières: Géorgie – Azerbaidjan – Iran – Turquie

Altitude: 1370 m en moyenne

Monnaie: le DRAM

Y ALLER

Pas de vols directs de Suisse. Transit par Paris, Vienne. Kiev, Athènes, Moscou ou Varsovie. Un vol direct de Lyon.

VISITER

Le Matenadaran, les Cascades, le mémorial du Génocide à Erevan, le monastère de Khor Virap, le site archéologique de Zvartnots, le monastère de Tatev, le lac Sevan. La station de Dilijan pour des circuits à pied, cheval ou vélo. Jermuk pour un séjour thermal.

INFORMATIONS

Possibilité d’y aller seul.

Hôtels de toutes catégories, du cinq-étoiles à 30 frs. la nuit.

Des agences, sur place ou en Suisse, proposent des tours, à tous les prix.

Site officiel du tourisme arménien: https://armenia.travel/en

LIRE

«Fragments de ma vie », Martiros Sarian, Edition du Progrès, Moscou, 1971, traduit en français.

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